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Ter ES Saint Paul Ajaccio
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10 mai 2007

l'égalité des chances un principe

L'égalité des chances... Des mots qui circulent d'un gouvernement à l'autre, qui passent d'une école à l'autre, tel le titre d'une récitation apprise par cœur par l'ensemble des acteurs scolaires. Mais de quoi parle-t-on ?

L'égalité des chances, c'est une expression. Elle apparaît pour la première fois dans un discours de Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'éducation, le 7 février 1986. Depuis, tous ses successeurs s'approprient la formule, l'école devant assurer l'égalité des chances pour tous les élèves.

L'égalité des chances, c'est aussi un principe. L'école républicaine, obligatoire et gratuite doit assurer l'égalité entre les citoyens. La France, comme le rappelle le sociologue François Dubet, est attachée à l'idée de justice. La tradition républicaine et anti-aristocratique repose sur le principe selon lequel la seule manière de produire des inégalités acceptables, c'est de construire une compétition qui permettrait de dégager une autre hiérarchie sociale, s'opposant ainsi aux hiérarchies tenant à l'héritage et au passé. Pour les père fondateurs de la République, l'école s'est substituée à l'Eglise dans sa capacité à transmettre des valeurs et des principes, dans sa capacité à former les citoyens. L'école, c'est la République, et la République, c'est l'école.

Les années 1960 ont marqué un tournant. Avant, le système scolaire répondait aux exigences de l'Etat républicain. Le modèle scolaire parvenait à redistribuer les connaissances pour tous ceux qui avaient accès au savoir. Après, la France a changé de registre. Tous les élèves, riches ou pauvres, sont allés dans la même école. Dans ce nouveau système, la règle de l'égalité des chances a impliqué que tous les élèves munis de leur bâton de maréchal dans le cartable ont eu la possibilité de réussir. La compétition s'est démocratisée, l'école s'est "massifiée" en même temps que le système n'est plus parvenu à surmonter ses propres contradictions devenues sources d'inégalités. Certaines voix, comme celles des sociologues Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, se sont élevées pour montrer que l'école ne faisait que répéter les inégalités sociales. Pour eux, le système scolaire constituait le "meilleur allié du conservatisme social et politique" (Les Héritiers, Editions de Minuit, 1964).

UN DEVOIR URGENT DE CHANGEMENT

Quarante ans après, les inégalités scolaires se sont accrues en France, à l'image des mutations économiques, facteurs de disparités en tout genre. De réforme en réforme, le système scolaire est devenu une institution en état grippal permanent. Le modèle scolaire républicain marche tellement à plein régime qu'il est en surchauffe constante et ne peut donc plus faire face aux pressions extérieures – qu'elles soient politiques, économiques, sociales, culturelles ou religieuses. L'école n'est plus un sanctuaire mais devient un buvard ; un buvard dont les auréoles sont le reflet de ses propres contradictions mais aussi celles de la société. Elle absorbe en quelque sorte les inégalités qui l'entourent. Au fond, les inégalités sociales se sont déplacées de la société dans l'école pour se reproduire dans la société.

Si bien qu'aujourd'hui, l'égalité des chances, c'est aussi une loi. Le 2 juin 2005, Azouz Begag, écrivain et sociologue, est nommé ministre délégué à l'égalité des chances. Il n'est pas vraiment mis en avant par le gouvernement. C'est à partir de novembre 2005, juste après la crise des banlieues, que l'égalité des chances se présente réellement comme une nécessité et devient en quelque sorte un devoir, un devoir urgent, celui de changer la société. La loi sur l'égalité des chances, dont M. de Villepin a pris l'initiative, veut donner une priorité au combat contre les inégalités, notamment dans le système scolaire.

Alors, faut-il préserver l'égalité des chances pour surmonter la crise de l'école ? Pour Patrick Fauconnier, cette égalité n'est envisageable que si l'on revoit complètement le sens même de l'école. Il faudrait, affirme-t-il, passer de l'"école-raffinerie" à l'"école-pépinière", c'est-à-dire ne plus concevoir le système éducatif sur "une base hiérarchique", mais en aidant chacun "à réussir là où il est doué". Pour Jean-Paul Brighelli, il faut d'abord sortir des slogans et détruire la machine à fabriquer des "crétins". Attention, dit François Dubet, à ne pas casser la clé de voûte du système, qui est celle de l'égalité méritocratique des chances. Mais comment en est-on arrivé là ?

Sylvie Chayette et Gaïdz Minassian

01.12.06 | 15h12

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